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Pourquoi et comment Le Marathon des Sables et les Half-Marathon des Sables vont-ils fusionner ?

Par Simon CHRETIEN , le 5 octobre 2023 , mis à jour le 9 octobre 2023 - 4 minutes de lecture

La nouvelle a été rendue officielle ce mercredi 4 octobre. Le mythique Marathon des Sables (MDS) et ses 240km en 5 étapes dans le désert marocain fusionne avec les Half-Marathon des Sables (HDMS) créés en 2017. C’est Cyril Gauthier, fondateur des HMDS (70 à 120 km en trois étapes) et actionnaire jusqu’alors du MDS qui prend les commandes de cette nouvelles entité. Pourquoi une telle opération et à quoi doit-on s’attendre désormais ?  Les réponses de Cyril Gauthier.

Jogging International : qu’est ce qui a entraîné la fusion entre ces deux évènements bien distincts jusqu’alors ?

Cyril Gauthier : Pour comprendre il faut remonter en arrière. J’ai découvert le Marathon des Sables en 2009 en tant que coureur. Cette épreuve a alors suscité ma curiosité. J’ai compris que c’était plus qu’une simple course grâce notamment à son ambiance, sa vie sur le bivouac. Elle a été un fait marquant dans ma vie de coureur. J’ai alors entamé des discussions avec Marie et Patrick Bauer, les fondateurs et organisateurs de cette course. Comme mon métier de base, c’est la logistique et le marketing, je leur ai proposé de faire évoluer les choses. La première chose que j’ai faite est de mettre au point des produits digne de l’évènement dans la boutique du Marathon des Sables. On est alors devenu amis et le couple m’a demandé de m’impliquer plus. J’ai été le Padawan de Marie et Patrick de 2010 à 2014 avant de devenir l’actionnaire principal de la course. Pendant cette période, on a développé ensemble la « refonte » du MDS en apportant des changements de technologies et en intégrant les réseaux sociaux par exemple. La course s’est encore développée et a changé. En 2016, j’ai expliqué à Marie et Patrick que le MDS avait tendance à faire peur à trop de coureurs. Et que beaucoup hésitaient, à tort, à s’y frotter. D’où l’idée de mettre en place un format plus accessible en créant les Half Marathon des Sables. Patrick a trouvé ça intéressant et m’a laissé créé ce concept. Le but était de permettre aux coureurs de tester l’aventure dans le sable avec un sac à dos sur ces HMDS avant de tenter le « big one ». C’est en 2017 que le premier HMDS à Fuerteventura a vu le jour. Au bout de quelques années, on s’est rendu compte que de plus en plus de coureurs du MDS, de l’ordre de 15 à 25%, étaient passés en amont sur les HMDS, qu’il s’agisse de coureurs élites ou lambda. La boucle était bouclée. L’idée, dès 2014 quand je suis devenu le principal actionnaire du MDS, était de préparer la suite, la succession de Patrick. Et c’était bien accepté par l’ensemble des équipes.

Vous devenez donc le directeur général de cette nouvelle entité. Que devient Patrick Bauer, qui incarnait à lui seul le MDS.

Patrick reste le président de l’association Solidarité Marathon des Sables mises en place depuis plusieurs années déjà. Grâce à sa connaissance du tissu marocain, il a réussi a développé cette structure qui favorise l’éveil au sport des jeunes et l’alphabétisation de leur maman. Patrick va donc se décharger du stress de la course pour se consacrer à son rôle au sein de l’association. Celle-ci intervient par exemple en ce moment même suite au tremblement de terre au Maroc. Avec sa force et son pouvoir de conviction, Patrick va permettre à l’association de se développer encore plus. Il faut savoir qu’aujourd’hui, elle a son propre centre et ses propres pistes d’athlétisme et terrains de foot à Ouarzazate. L’objectif est de montrer que, derrière la course, il y a une vraie implication dans le pays.

Créateur du Marathon des Sables il y a 39 ans, Patrick Bauer laisse la main à Cyril Gauthier. CIMBALY_MDS2023@FranckOddoux

Comment va s’articuler cette nouvelle organisation, qu’est ce qui va changer concrètement ?

Les Half Marathon des Sables prennent désormais le nom de Marathon des Sables auquel on accole le nom de la destination. Et le Marathon des Sables devient « The Legendary Marathon des Sables ». Mis à part ça, il n’y aura pas de changements révolutionnaires sur les courses. Seulement quelques petites évolutions. Certaines règles du HMDS seront appliquées au MDS Legendary comme par exemple la possibilité de reporter son inscription gratuitement à l’édition d’après en cas de blessures. De la même façon, on prendra les choses qui fonctionnent sur le Legendary MDS pour les reporter sur les MDS. Mais on reste une seule et même équipe. 100% des personnes restent en place, on sera même dans un recrutement afin de mieux se structurer ensemble.

Ne craigniez vous pas une confusion auprès du grand public ?

Il faut bien savoir que les coureurs et la presse qui s’intéressaient à ces évènements avaient déjà tendance à enlever le Half aux épreuves des HMDS. Donc, non, on ne confondra jamais les anciens HMDS avec le MDS. Je pense que ça ne va rien changer. On voit rapidement la différence de concept. La différence c’est principalement la distance proposée et l’organisation du bivouac. Les nouveaux MDS resteront des courses qui permettent de se tester ou qui séduira d’anciens finisher du The Legendary MDS qui souhaitent faire plus court. La différence entre les deux c’est aussi de pouvoir découvrir les plus beaux déserts du monde.

S’achemine-t-on tout droit vers un circuit type UTMB World Series ?

Ce n’est pas du tout l’idée. The Legendary MDS restera ouvert sans système de qualification. Le but encore une fois des nouveaux MDS est de permettre de découvrir les déserts du monde, d’apprendre à courir dans le sable avec les contraintes qui ça implique. Les MDS demeureront des courses qui permettent de faire comprendre aux coureurs qu’ils sont capable de participer à l’épreuve de 250km. Ces épreuves permettront notamment de montrer aux femmes qu’elles ont les mêmes chances d’être finisher que les hommes. Je pense qu’on va ainsi faire augmenter drastiquement le nombre de femme sur The Legendary MDS. D’ailleurs dès 2024, nous allons mettre en place des tentes 100% femmes.

Les premiers Half Marathon des Sables ont vu le jour en 2017. Photo : Eric Montgobert

Les courses dans le désert ont le vent en poupe. Cette fusion est-elle aussi le moyen de sortir du lot face à la concurrence ?

Sans vouloir être présomptueux, je ne considère pas ceux qui organisent des courses dans le désert comme des concurrents mais comme des confrères, qui ont leur propre formule. Pour nous, ce n’est pas aujourd’hui un créneau si important. En revanche, notre grande mission désormais est de réduire la trace carbone que laissent nos évènements. Et c’est l’énorme évolution qu’il faut qu’on amène. Notre objectif est donc de faire chuter drastiquement notre empreinte carbone. Ca passe par notre mode de fonctionnement mais on doit aussi davantage sensibiliser la communauté des MDS. Notre espoir est de faire en sorte que la consommation carbone personnel des coureurs due à leur participation soit compensée par les efforts qu’ils réalisent en amont ou en aval de l’évènement. Tout un programme se mettra en place. Les coureurs qui participent aux MDS ne sont pas des coureurs comme les autres. Ils ont un leadership qui leur permet par la suite de devenir des ambassadeurs auprès de leur communauté. On souhaite que la rigueur qu’ils mettent dans leur entraînement et leur diététique soit identique sur la question de l’éco-responsabilité. En 2024, nous aurons 4000 coureurs qui participeront aux MDS, donc si ces 4000 coureurs parlent de leur rôle par rapport à l’environnement, on aura réussi quelque chose. Ca pourra être très puissant. En plus de cela, on va les inciter désormais à lever des fonds pour les causes que nous choisirons. L’objectif est d’utiliser la puissance de l’outil MDS pour le transformer en quelque chose de concret, être dans l’action. Les MDS sont des courses magiques, on doit donc apporter quelque chose de nouveau, qui a du sens au 21è siècle. Désormais les coureurs du MDS vont devenir des pièces maîtresse dans l’évolution qu’on doit avoir pour notre planète.

Doit-on s’attendre à de nouvelles courses Marathons des Sables dans l’avenir ?

Pour 2024, on part sur sept Marathons des Sables en plus du Legendary MDS. Deux nouvelles destinations voient le jour : la Namibie et la Cappadoce en Turquie. Pour la Namibie, le format est un peu particulier car l’évènement se tient sur 11 jours et associe course et safari. Il faut savoir aussi qu’une grande partie des participants proviennent des pays voisins comme l’Afrique du Sud. Enfin, et de manière générale, on est toujours dans l’incertitude liée au contexte du pays qui nous accueille. On a pas mal de pays qui nous demandent d’installer la course mais pour l’instant, le but est de stabiliser l’organisation. On verra par la suite.