Courses

Athènes 2004… par procuration…

Par La Rédaction , le 2 novembre 2016 - 5 minutes de lecture

Dominique évoque ses rêves d’olympisme… Les siens, de 80 et 96, mais aussi ceux qu’il nourrit à travers les performances de l’étonnante Corinne Raux.

Mes premiers souvenirs ou images de jeux olympiques viennent de petites figurines métalliques auxquelles il fallait tordre des pattes pour les faire tenir debout. Elles représentaient les meilleurs athlètes français et on les trouvait dans les boîtes du Banania matinal. Nous sommes en 1968, Mexico se profile dans quelques mois et le collège ferme plus tôt que prévu suite aux événements de mai. Les Besson, Dupureur, Pani, Piquemal, Bambuck… trônaient ainsi tel des soldats de plombs sur mon étagère.

Le saut de Beamon à 8,90 m, la folle remontée de Colette Besson coiffant sur la ligne l’anglaise Lilian Board (non, non, je ne révise pas), les poings gantés de noir levés sur le podium par les sprinters américains contestataires Smith et Carlos, marqueront le gamin que j’étais mais qui, à aucun moment, n’aurait imaginé qu’un jour il puisse participer à une telle fête !

Et même quelques années plus tard, coureur de haut niveau devenu, j’ai longtemps cru que je n’arriverais jamais à me faire sélectionner pour les jeux !

– 1980. J.O. de Moscou, sélection olympique à Liévin. 23 ans, premier marathon, mais sans espoir olympique avec un 2 h 17 mn à l’arrivée.
– 1984, J.O. de Los Angeles. Je suis l’un des tous meilleurs français depuis 81… la sélection se fera sur le Marathon de Paris. Un point de côté au 25e km -le seul de ma carrière- anéantira mes espoirs ! Mon rival Boxberger courra ces Jeux.
– 1988, J.O. de Séoul. Ne suivant pas le « processus fédéral » et en froid avec l’entraîneur national, je ne serai pas sélectionné. Vexé, j’irai courir le marathon de Pékin quelques semaines après les jeux. 4e en 2 h 12 mn 04 s, meilleur temps français de l’année, je prouvais ainsi que j’avais ma place à Séoul et affirmais ainsi un caractère rebelle… mais j’avoue que ce sera la plus grande déception de ma carrière car j’étais, je pense, au top à ce moment !
– 1992, J.O. de Barcelone. Les temps changent, bichonné par la fédération après ma médaille au championnat d’Europe, je suis sélectionné « d’office » un an à l’avance. Après longtemps avoir couru dans les 15, un coup de chaud me fit rétrograder à la 31e place. Mais j’y étais, enfin !
– 1996, J.O. d’Atlanta, malgré mon âge (40 ans) je tente ma chance, la chaleur pesante sur le marathon de Paris empêchera toute performance (16e position en 2 h 16 mn) et aucun Français ne sera qualifié.
Puis vient le temps du coaching.

Désormais, ce sont « mes » athlètes qui tentent leur chance de qualif. En 2000, avec 2 h 17 mn, à Rotterdam, Momo Serbouti est recalé pour les JO de Sydney…

J’insiste et découvre une coureuse de talent, au mental de fer, 18 mois d’entraînement en commun. Je revis ma carrière en double : même ambition, même organisation, même objectif. Elle s’appelle Corinne RAUX, un essai réussi au Mont St Michel l’an passé. Son 2e marathon sera Paris avec pour objectif le minima olympique féminin situé à 2 h 32 mn. Mon investissement est total, je cours Paris pour elle, avec elle. Je l’abrite du vent, lui donne ses temps, lui prend ses ravitaillements, la rassure sur notre avance durant la course… cela dure jusqu’au 33e kilomètre, elle terminera seule en 2 h 29 mn17 S soit avec plus de 2 minutes trente d’avance sous la « barre » olympique.

Pour moi ce sera une fin de marathon… en métro, pressé d’arrivée car légèrement inquiet. Je la revois enfin dans l’aire d’arrivée, flageolant sur des « pattes » moins stables que celles de mes fameuses figurines. « Quoi, 2 h 29 mn ! » à travers les autorités et les journalistes nous nous jetons dans les bras l’un de l’autre. Peu de mots, le regard suffira, les yeux humides, l’émotion est partagée. Je me retiens, toujours cette pudeur. J’avais mis 12 ans pour y arriver et elle 18 mois !

Dans trois mois, ATHENES, 22 août, l’épreuve olympique, départ de ce village nommé « marathon » pour une arrivée au stade antique… trois marathons courus là-bas, autant d’expériences à faire partager et de pages à écrire pour connaître la suite de cette aventure… et de kilomètres à parcourir pour elle. Nouvel épisode du feuilleton de ma vie… mais quelle émotion de courir à travers quelqu’un d’autre !…

Je pense déjà à Pékin 2008… J’en veux encore !

Rubrique « Entre nous », par Dominique Chauvelier

Voir toutes les chroniques de Dominique Chauvelier

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre commentaire sera révisé par les administrateurs si besoin.