Perdez des kilos, pas votre motivation !
Perdre du poids, en théorie, n’est pas la chose la plus difficile au monde. Encore moins lorsque l’on pratique régulièrement une activité telle que la course à pied. Seulement, quand le mental et la motivation n’arrivent pas à suivre, la rechute n’est jamais loin…
Cruelle réalité : la course à pied ne fait pas maigrir. Du moins si elle ne doit être que le seul outil dans votre chasse aux kilos superflus. « Le trait est peut-être un peu grossier, mais on considère que, dans la cadre de la perte de poids, l’alimentation joue à 70 % tandis que l’activité physique fait le reste du travail », considère la nutritionniste Carole Mangeard. « Dans ces deux secteurs, le but va être de prendre de nouvelles habitudes. Une transition d’autant plus difficile que, dans les premiers temps de ces changements, le spectre de l’abandon n’est jamais loin… »
Dans ce cadre, comment réussir à tenir le coup pour éviter d’enchaîner périodes vertueuses et phases pendant lesquelles les kilos en trop vont revenir au grand galop, parfois accompagnés de nouveaux camarades (le trop fameux « effet yoyo ») ? « Paradoxalement, au départ, je note souvent un trop-plein de motivation qui, au final, va se révéler néfaste : le non-sportif va se mettre à courir six fois par semaine en diminuant parallèlement de manière drastique ses apports alimentaires pour, inévitablement, perdre cette belle motivation sous le coup de la fatigue et de la faim qui l’assaillent à longueur de journée. » Comment donc tenir ses bonnes résolutions dans sa quête de perte de poids ?
Une partie de la réponse pourrait se trouver dans le champ de… l’économie comportementale. Pour résumer, ce champ disciplinaire étudie l’influence des émotions et des facteurs personnels dans la prise de décisions économiques. Mais quel rapport avec le fait de ne pas vous jeter sur la première pâtisserie venue ou de ne pas arrêter de courir 10 minutes après le début de votre sortie ? La réponse vient de deux universitaires américains, Katherine Milkman et Kevin Volpp, qui ont transposé le fruit de leurs recherches en matière économique à l’univers de la motivation et des résolutions. Ils ont édicté quatre principes, que nous allons décrypter avec le docteur Mangeard.
Fixez-vous un but bien précis
Si votre but est flou, votre motivation le sera également. « Dans ce cadre, les coureurs ont indéniablement un avantage. Ils aiment suivre des plans, recherche un chrono spécifique… Il leur suffit d’utiliser cette « science » dans le cadre de leur perte de poids. » Pour garder sa motivation, il va vous falloir vous fixer deux types d’objectifs : « Le premier sera, bien entendu, un objectif à long terme qui, sera, lui, jonché d’objectifs intermédiaires. Attention au piège de la pesée quotidienne, souvent source de découragement et non-significative. Je préconise une pesée hebdomadaire, ce qui est largement suffisant. Attention cependant à vous fixer des objectifs atteignables : la dictature de l’IMC (Indice de masse corporelle) fait que beaucoup veulent perdre x kilos sans prendre en compte que le poids, en valeur absolue, n’est pas toujours significatif. C’est d’autant plus vrai pour les sportifs, dont la pratique va amener un gain musculaire. Ainsi, il vaudrait mieux se concentrer, par exemple, sur son taux de masse grasse. Mais tout le monde n’a pas accès à une balance à impédancemètre fiable, le poids restant donc pour beaucoup le repère le plus significatif. » La prise régulière de photo vous aidera également à mesurer le chemin parcouru et à rester sur le bon chemin.
Entourez-vous
Là encore, nutrition et course à pied, même combat ! « L’un des principaux obstacles à la réussite d’un rééquilibrage alimentaire est le peu de soutien de son entourage. Ce « sabotage », la plupart du temps inconscient, peut prendre la forme de remarques paraissant anodines (« Ça va, ce n’est pas une part de pizza qui va te tuer ! ») ou d’actes comme le refus de, au minimum, limiter la présence des aliments les plus « dangereux » dans le foyer. On est dans la même logique qu’un coureur qui se verrait sans arrêt reprocher ses sorties et ses compétitions : dans un cas comme dans l’autre, la pression psychologique va faire que, au bout d’un moment, la personne ne se sent absolument pas soutenue. » Dans le cadre de votre alimentation, il faut donc, dès le début, expliquer votre démarche à vos proches et leur demander de faire des efforts afin de vous aider à garder votre motivation. Expliquez-leur combien cette perte de poids est importante pour vous et que vous avez besoin d’eux pour y arriver. Ils se sentiront ainsi intégré à votre projet et seront bien plus soucieux de sa réussite. « Je recommande également l’usage des outils offerts par Internet. Pour ma part, je recommande à mes clients Fat Secret. Si le nom n’est pas vraiment séduisant, le concept l’est bien plus : il s’agit d’un site gratuit sur lequel vous pouvez, chaque jour, mettre en ligne vos repas (si compter les calories n’est pas forcément une pratique conseillée, cela vous permet malgré tout de vous rendre compte de vos « sorties de route »), tenir un journal de votre progression et échanger avec d’autres personnes menant la même bataille. Ce sera d’autant plus important si vous ne réussissez pas à obtenir le soutien de votre entourage… »
En cas de tentation, projetez-vous
C’est l’une des leçons principales, selon Milkman et Volpp, que peut nous donner l’économie comportementale : réussir à contrôler ses pulsions (par exemple le désir d’un achat peu raisonnable) en pensant aux conséquences à long terme, en se projetant. Remplacez juste le projet d’achat d’une maison par l’ambition de boucler votre marathon en moins de quatre heures, de voir le bout d’un trail de 50 km ou, plus simplement, de vous sentir mieux dans votre peau. « Encore une fois, le coureur à pied est en quelque sorte un privilégié quand il veut rester motivé : s’il court pour perdre du poids, il peut également renverser l’équation et se dire qu’il perd du poids pour courir. L’avantage, c’est que les résultats se voient très vite. En fait, parmi mes patients coureurs, nombreux me disent que, dès la perte du premier kilo, les sensations de course commencent à être bien différentes. Alors si vous êtes sur le point de craquer, d’envoyer vos idées de rééquilibrage alimentaire par la fenêtre, posez-vous et réfléchissez bien à ce que vous avez à gagner. Faites-le au calme, les yeux fermés de préférence, sans vous mentir sur votre état de forme actuel. Cela peut paraître gadget, mais ça peut être la clé d’une motivation retrouvée ! »
Relancez la machine à des dates clé
Si jamais vous avez retrouvé vos (mauvaises) habitudes alimentaires précédentes, Milkman et Volpp ont découvert que le meilleur moyen de repartir dans le bon sens était de le faire à une date symbolique. Selon les chercheurs américains, le mieux est la date de votre anniversaire. Mais si vous vous êtes de nouveau jeté sur les cookies le 25 mai et que votre anniversaire est le 12 avril, il va bien falloir trouver une parade. Le mieux sera alors de se fixer comme date de nouveau départ le premier jour du mois suivant, comme ils l’ont expliqué dans leur publication « The Fresh Start Effect » (« L’effet nouveau départ ») : « Ces dates clés marquent le passage à une nouvelle période, créant ainsi de nouvelles perspectives et reléguant les imperfections et les erreurs du passé à une période précédente. Cela permet de prendre du recul sur sa vie et motive à adopter plus facilement les comportements souhaités. » Pour le démontrer, les chercheurs ont remarqué que, dans Google, les termes « régime » et « salle de sport » étaient davantage recherchés juste au moment de telles dates : début d’année, de mois ou de semaine, début de vacances, etc.
Les infos en plus
L’argent, le nerf de votre guerre ?
Daniel Kahneman, Nobel d’économie en 2002, avait montré que les humains étaient plus motivés par la peur de la perte que par l’appât du gain. C’est ce principe qu’ont repris certains sites pour vous pousser à respecter vos bonnes résolutions. L’un des plus connus dans le domaine : stickK. Son principe : vous passez un contrat, par exemple « Je veux perdre 5 kilos d’ici deux mois ». Vous mettez une somme d’argent en réserve. Si vous atteignez votre but, cette somme vous est reversée. Si vous échouez, la somme est donnée, au choix, à un ami, une association caritative ou, ce qui semble être le plus efficace, à une cause qui va à l’encontre de vos opinions (« l’anticharité »). Afin que vous ne trichiez pas si votre but n’est pas atteint, vous devez nommer un proche, arbitre qui validera ou non la réussite de votre projet.
La motivation change avec l’âge
Si l’on se penche sur les données récoltées à propos de près de 3 000 participants d’un programme national de perte de poids aux Etats-Unis en 2013, on s’aperçoit que les motivations varient en fonction de l’âge des participants. Les 18-35 ans (28,6 % du groupe) évoquaient ainsi principalement l’apparence, la pression sociale et le regard qu’ils portaient sur eux-mêmes. Les 36-50 ans, eux, parlaient majoritairement de problématiques liées à la santé. Autre conclusion de l’étude : si les deux groupes ont réussi à perdre autant de poids, les plus jeunes en ont ensuite repris plus vite que leurs aînés.
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