Jean-Christophe Holzerny : L’esprit sportif
Les frères Holzerny courent beaucoup. Et vite. Jean-Christophe, le cadet, a décidé d’y ajouter « un peu » de natation et de vélo. Avec un objectif ultime pour ce prof agrégé de philo : l’IronMan d’Hawaï.
François, né en 1972, champion de France vétéran de marathon en 2012. Benoît, né en 1977, sélectionné en équipe de France de semi-marathon pour les mondiaux 2009. En course à pied, on peut dire que la famille Holzerny se défend… Jean-Christophe, né en 1974, a lui, tout jeune, préféré se jeter à l’eau plutôt que de s’attaquer au bitume. À 10 ans, le jeune garçon s’envoie huit entraînements en piscine par semaine et devient le meilleur Français de sa catégorie d’âge. Les études suivent la même destinée : bac avec mention très bien, prépa littéraire, École normale supérieure (ENS), agrégation de philosophie à 24 ans… En parallèle, il continue le sport et se dirige progressivement vers le triathlon longue distance. « J’étais en quelque sorte un Ovni à l’ENS, école où il n’y avait pas du tout de sportifs. Et je me sentais aussi décalé dans le triathlon, où mon goût pour la philosophie paraissait exotique. »
Flexions et réflexion
Pourtant, celui qui est devenu professeur de philo en lycée et classe prépa l’affirme : « Quand on voit ce que font les sportifs, quand on les écoute et qu’on se rend compte de la réflexion qu’ils ont sur leur pratique et sur eux-mêmes, il y a obligatoirement un pont avec la philosophie. Il n’y a pas de cloisonnement entre le corps et l’esprit, au contraire, tout est intimement lié. (…) Le sport me permet d’améliorer ma réflexion sur ce qui m’entoure et d’anticiper des cours pour mes élèves ! Un peu comme Nietzsche, les meilleures idées me viennent en courant ! » De la philosophie, il a dû en faire preuve, en 2016. 73e de l’IronMan de Nice en 9h39min41s (rappelons que cette « blague » sportive demande d’enchaîner 3,8 km de natation, 180 km de cyclisme et un marathon), il se qualifie pour le mythe : l’IronMan d’Hawaï. Sauf que, « il fallait s’inscrire dès le lendemain ! Professionnellement, je n’avais pas pu anticiper le calendrier pour me libérer. Pour un tel projet, il faut prévoir longtemps à l’avance et avoir un soutien financier ! ». À 700 $ (environ 550 €) le dossard, le rêve a un sacré prix. On y ajoutera, pour la bonne bouche, 2 000 € de frais de déplacement. « Si je m’y qualifie de nouveau, c’est peut-être l’histoire d’une vie et j’y emmènerai certainement ma famille. Il faut donc anticiper financièrement et sportivement. Je suis à la recherche de sponsoring pour ce projet et, sportivement, je jouerai ma qualification sur un IronMan en fin de saison 2018, ce qui me laissera un an pour préparer Hawaï, qui se déroule en octobre, l’année suivante. »
Passer outre la pression
En cours de saison, ce ne sont « que » quinze heures d’entraînement par semaine que le prof peut se permettre. Avec une obligation : améliorer le cyclisme. « À Nice, j’ai reculé à la 21e place sur la partie vélo après être sorti premier de la natation chez les amateurs et 11e du général. » Petite marge de progression également en vue en course : ayant bouclé le marathon de l’IronMan français en 3 h 11 (doit-on vous rappeler qu’il avait 3,8 km de natation et 180 km de vélo dans les jambes ?), il pense pouvoir gagner environ cinq minutes sur les 42 km. Un élément en sa faveur : il sait désormais comment il fonctionne, se connaît mieux et a arrêté de s’imposer une trop grosse pression, qui pouvait expliquer certains échecs passés. « À Nice, il y a eu de l’émotion, car c’était la réussite de l’entraînement, des efforts consentis avec tous ceux qui ont participé à ce projet. Je me suis préparé psychologiquement à réussir. Je suis passé dans les temps prévus à la minute près ! Mark Allen, un des plus grands triathlètes de l’histoire, a eu beaucoup d’échecs au début. Puis, il a trouvé une forme de sagesse adaptée à la pratique de son sport et il n’a ensuite cessé de gagner… Il est devenu psychologiquement plus fort que les autres. Ce genre de personnage et de parcours m’inspire beaucoup. » Dans sa ligne de mire, un autre projet, sans doute plus personnel : l’écriture. Des textes sont déjà prêts, dans lesquels le sport et la philosophie naviguent de concert. Histoire que la philo ne soit pas « que le domaine des intellectuels ». Et que le sport soit une véritable philosophie. Un autre effort de longue durée en prévision…
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