Quelle viande pour le coureur ?
Les dessins rupestres trouvés dans les grottes de nos ancêtres de la préhistoire montrent combien l’existence de l’homme était liée à sa consommation de viande. Aujourd’hui, les sportifs ont tout intérêt à en manger, mais quel est la viande à privilégier dans l’optique sportive ?
Divers scandales sanitaires ont grossi durant les dernières décennies les rangs des « anti-viande rouge ». La viande blanche, du moins jusqu’à la crise de la grippe aviaire, en a moins souffert. Moins grasse, elle a les faveurs des accros au « régime ».
Pourtant, toutes les viandes peuvent, et doivent, être intégrées dans les menus des joggeurs. Sous certaines conditions…
Pourquoi une différence de couleur ?
Deux pigments contenus dans le sang colorent la viande : l’hémoglobine et surtout la myoglobine. Cette dernière, beaucoup plus colorée de rouge que l’hémoglobine, se trouve en grande quantité dans les muscles. Son atome de fer est très actif.
De nombreux facteurs modifient la teneur de ce pigment sanguin, et donc la couleur de la chair :
– l’espèce tout d’abord. La teneur en myoglobine est par exemple de 0,05g pour 100g de viande de porc, alors qu’elle est de 0,4g pour la viande de boeuf du même âge et dans le même muscle.
– l’âge aussi : si chez le veau d’un mois on trouve 0,1g de myoglobine pour 100g de viande, chez un taurillon de 12 mois, on passe à 0,3 g.
– l’alimentation enfin, qui est un des facteurs le plus important. Les veaux dits « de lait » doivent la pâleur de leur chair à une alimentation exclusivement lactée, donc insuffisante en fer, au contraire des veaux dit « broutards » ou « d’élevage » recevant une alimentation variée (granulés végétaux, poudre de lait…).
La viande rouge : une mauvaise réputation injustifiée
Régulièrement boudée par les sportifs qui lui reprochent d’être grasse et de laisser des déchets difficiles à éliminer dans le sang, la viande rouge mérite pourtant une part plus importante dans l’assiette des athlètes, même adeptes de l’endurance comme les joggeurs.
En effet, ses protéines sont d’excellente qualité, ses vitamines quasi-exclusives (B12, B6…) participent au rendement et à l’entretien musculaires, et sa richesse en fer en fait un aliment « anti-coup de pompe ».
Ce minéral transporte l’oxygène jusqu’aux organes qui en ont besoin, comme le muscle durant l’effort (d’où la quantité de myoglobine très importante dans les fibres musculaires). Le fer végétal (lentilles, épinards…) est trois fois moins absorbé que celui des viandes rouges ! Sans oublier que la viande rouge contient en grande quantité du zinc particulièrement bien assimilable (2 mg/100g) qui intervient dans les mécanismes de synthèse des protéines.
Une légère carence en cet oligo-élément entraîne d’ailleurs une diminution de la capacité à l’effort, car le zinc gère également le métabolisme des glucides (« sucres »), carburant préférentiel du muscle. Il est également fortement anti-oxydant, ce qui protège tous les tissus des agressions et des dégradations liées au métabolisme de l’oxygène, fréquentes lors des courses.
Cependant, une étude portant sur l’alimentation et l’apparition des cancers ne plaide pas en faveur d’une forte consommation de viande rouge. Les patients qui ont été considérés comme les plus gros consommateurs de viande rouge en début et en fin d’étude, présentaient en effet un risque de cancer colorectal deux fois plus élevé. Inversement, ceux qui mangeaient le plus de poisson et de poulet, diminuaient ce risque de 23 à 30% !
Toutefois attention, on parle ici d’apports importants de viande rouge. Une consommation faible ou modérée ne semble pas néfaste, d’autant plus si l’on choisit les morceaux les plus maigres (cf. encadré).
La viande blanche : une qualité irréprochable
La viande blanche, quant à elle, avec ses 20 à 25 g pour 100 g, est très riche en protéines de qualité irréprochable. En contenant tous les acides aminés indispensables d’excellente qualité biologique, elle permet de maintenir une intégrité musculaire optimale en apportant notamment les matériaux utiles à la réparation des fibres « lésées » par l’effort. Généralement moins grasse que la viande rouge (cf. encadré), elle est aussi plus facile à digérer.
En revanche, la viande blanche contient moins de fer que sa consœur rouge (1,5 mg contre 4 mg ), mais sa biodisponibilité, c’est-à-dire son absorption et son utilisation par l’organisme, sont optimales. Idem pour les vitamines du groupe B, dont certaines, comme la B1, sont très utiles pour le coureur. En effet, le rôle de cette dernière dans l’utilisation des différents sucres à des fins énergétiques la rend indispensable aux sportifs. C’est en quelque sorte une vitamine anti-fatigue.
Les abats, les grands oubliés
Les abats représentent les morceaux de viande qui ne font pas partie de la « carcasse », comme le foie, le cœur, les rognons…. Riches en acide urique, ils ne sont pas conseillés lors des repas post-effort, car ils acidifient trop le milieu ambiant et concurrencent l’élimination de l’acide lactique. De plus, il n’est pas rare de voir les marathoniens de plus de 40 ans, suite à de fréquentes déshydratations, mauvaises irrigations rénales et moins bonne élimination, souffrir plus fréquemment de calculs rénaux. Ces derniers sont très sensibles à l’élévation d’acide urique, et il vaut donc mieux éviter les abats lors des repas qui suivent une course.
Ceci dit, les abats sont des sources importantes de sels minéraux, notamment de fer (avec plus de 10 mg pour une tranche de foie, un record) et surtout de vitamines du groupe B qui sont très sollicitées lors des efforts pour la combustion énergétique. Donc en période d’entraînement, mais de façon assez éloignée de l’activité, ces aliments devraient réellement faire partie intégrante du menu du joggeur, à raison d’au moins une fois par semaine.
En pratique pour le joggeur :
Le coureur à pied, comme tout individu, doit savoir varier les plaisirs en alternant ses sources de protéines : viande rouge, viande blanche, œufs, jambon maigre, et deux fois par semaine au minimum, du poisson. Et si à la base, vous êtes réticent à la consommation de viande rouge ou d’abats, ne vous forcez pas à en manger chaque jour.
Mais ne tombez pas non plus dans l’excès inverse, car ces deux aliments représentent un des meilleurs apports intéressants de vitamines et minéraux, et notamment en fer. Dans le domaine de l’alimentation, tout est question d’équilibre et de variété !
En fait, si les études montrent que l’on dénombre plus de cancers chez les gros carnivores que parmi le reste de la population, c’est surtout qu’ils laissent moins de place aux légumes verts dans leur assiette et la viande étant très rassasiante, ils ont moins faim pour consommer des fruits en dessert. Or il est vrai que les légumes et les fruits sont nos meilleurs alliés pour nous protéger de nombreuses maladies. Résultat : pas de viande rouge sans légumes et fruits au menu des joggeurs !
Une consommation de viande rouge d’environ 100 à 150 g cuits avec une fréquence de 2 à 3 fois par semaine et d’une quantité égale de viande blanche avec une fréquence hebdomadaire de 3 à 4 fois peut donc être utile aux athlètes soucieux de leur forme.
En revanche, il est vrai que les viandes rouges sont des aliments un peu plus longs à digérer, et qui peuvent surtout laisser des déchets dans le sang et freiner l’élimination de l’acide lactique, facteur limitant de l’effort.
Privez-vous alors de viande rouge uniquement 24 heures avant l’effort intensif (sorties longues, courses intenses, randonnées difficiles…) et 24 heures après en les remplaçant par des œufs, du poisson ou de la viande blanche, notamment de la volaille. En revanche, une absence de viande rouge plus longue ou totale dans les menus des athlètes peut vraiment contribuer à des contre performances en déséquilibrant l’alimentation !..
Optez pour les moins grasses « Manger de la viande, jamais, c’est trop gras !… ». Cette affirmation est trop fréquente dans la bouche des joggeurs. En effet, de nombreux morceaux de viande sont très maigres, présentant moins de 5 % de lipides : – pour le bœuf : la bavette, le faux filet, le filet, la hampe, le jarret, la macreuse, le rosbif, le rumsteck, le tournedos (sans consommer la barde !..), le foie… – pour le veau : le bas de carré, l’escalope, le filet, le jarret, la noix, le rôti, le foie… – pour l’agneau : la selle rôtie, le gigot, le collier, le filet… – pour le porc : l’échine, le filet, la côte, le rôti, la charcuterie maigre (jambon, filet de bacon, viande des Grisons…), le foie… – pour la volaille (attention à la peau) : le poulet, le dindonneau, la pintade, la dinde, le lapin. |
« Steak alternative » Comment nourrir ses muscles ? Avec les protéines bien sûr, et on sait tous qu’elles se trouvent dans le bœuf, le poulet, le porc ou le poisson. Pas très original ? Alors troquez de temps votre steak contre certaines viandes « venues d’ailleurs » que proposent certains restaurants, épiceries fines ou magasins exotiques. Elles offrent bien souvent plus de protéines que les 22 % proposés par les éternelles escalopes de volailles ou pièces de bœuf. Bison : 24 g de protéines Moins gras que le bœuf mais tout aussi savoureux Autruche : 26 g de protéines Une viande rouge bien plus goûteuse que ses cousines de basse-cour Kangourou : 24 g de protéines Tendre comme un bon rosbif avec moins de gras Requin : 22 g de protéines Tendre comme un bon thon et riche en oméga 3 Renne : 28 g de protéines Une viande élégante riche en fer Castor : 25 g de protéines Le même goût de lapin et le même type de cuisson |
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