Mental : comment gérez la coupure en cas de blessure?
Il n’est pas toujours évident de gérer une période de blessure qui vous empêche totalement de courir. Trois sportifs, qui ont déjà été confrontés à ce problème, et un médecin vous en disent plus !
Xavier Boulanger, traileur : « Vivre dans le corps d’un autre »
« En 2016, une fissure du ménisque interne m’a obligé à stopper la course. Trois mois d’attente pour obtenir un avis médical puis programmer l’intervention chirurgicale. Quand on m’a annoncé deux mois d’arrêt de travail et encore trois mois sans sport, je savais que cette période allait être une vraie nouveauté… Huit mois sans courir : un cauchemar ! J’ai eu l’impression de vivre dans le corps d’un autre. Mentalement, le doute s’installe assez vite. Quinze jours après le bloc, les béquilles étaient toujours indispensables et ma cuisse ressemblait à celle d’un rugbyman ! La première séance de kiné a été décisive. Pour ma praticienne, il s’agissait une algodystrophie, maladie osseuse provoquant des douleurs et une déminéralisation des os. Diagnostic confirmé par une scintigraphie. Pathologie sans traitement reconnu, « l’algo » est une « petite » chose imprévisible qui finit presque toujours par disparaître. Parfois au bout de six mois, un an, deux ans… Bref, aucune certitude ! De quoi retourner la tête du sportif qui ne peut pas projeter une date de reprise ! Quand les douleurs sont présentes au repos comme pendant toute activité physique, même douce, il devient difficile de savoir ce qu’il faut faire ! »
Sébastien Hansen, coureur et triathlète : « La règle de la non-douleur doit prévaloir »
« Difficile de gérer une blessure sereinement. La perte de forme, la peur de s’ennuyer, le besoin de se dépenser se fait ressentir et chamboule un peu notre quotidien. Dans le cas où la blessure est complètement handicapante, le repos s’impose parce que l’on n’a pas le choix. Psychologiquement, c’est dur au début, mais on se rend compte rapidement que toute pratique étant impossible, il n’y a rien d’autre à faire que d’attendre la guérison. La patience est de mise, la sagesse aussi. Si la blessure empêche uniquement la course à pied, il reste la possibilité de faire un autre sport. Étant cycliste, le premier réflexe est de tester le pédalage. J’ai eu une pubalgie en 2015 qui m’a interdit la course à pied pendant huit mois, mais le vélo étant possible, cela a été plutôt facile à gérer. Bien sûr, si on est exclusivement coureur à pied, c’est plus compliqué de trouver du plaisir à faire du vélo ou un autre sport. On peut aussi nager, que l’on soit triathlète ou pas. Notre niveau technique de nage déterminera si cette activité peut réellement être un palliatif. Il y a également toutes les activités de renforcement musculaire, notamment le gainage et travail du haut du corps. Ce n’est pas forcément ludique, mais cela permet de s’entraîner et de garder des efforts au quotidien. Mais la règle de la non-douleur doit prévaloir… »
Céline Demmerle, traileuse : « Le manque s’est très vite fait sentir »
« J’ai été arrêtée suite à une erreur de diagnostic. Au départ, on pensait à une grippe. En fait, je faisais une pyélonéphrite [NDLR : infection bactérienne du rein] et une septicémie… J’ai eu très peur d’y rester. Côté sportif, j’ai dû stopper la course pendant quatre mois. Auparavant, je courais quatre ou cinq fois par semaine, soit 80 km. Spécialiste du trail et de l’ultra-trail, le manque s’est très vite fait sentir. Physiquement, le fait de rester allongée, avec la perte de poids, fut très dur. Se sentir aussi faible a très vite agi sur le côté psychologique. Pour m’aider à franchir cette étape, je me suis fait rapidement une amie très proche : l’électrostimulation ! Elle m’a facilité la vie ! Puis on relativise… Je suis allée à la rencontre de mon groupe d’entraînement. En vivant sa passion par procuration, on souffre, mais je ne voulais pas que l’on m’oublie. Cela voulait dire : “Je reviendrai !” Pour se rassurer, il faut parvenir à se dire que le corps a une mémoire et que pendant cet arrêt, il a pu récupérer d’une certaine façon. Même si c’est long, même si les foulées de reprise sont difficiles… »
Matthieu Diverres, médecin et coureur : « Un syndrome de sevrage »
« En cas d’arrêt brutal de la pratique sportive, il peut exister un syndrome de sevrage. En découle un fort risque de dépression, pouvant induire irritabilité, fatigue chronique, agressivité, des troubles alimentaires ou encore une prise de produits stupéfiants. Les vraies addictions au sport existent et doivent amener à consulter un médecin pour en discuter. Heureusement, la simple pratique intensive d’un sport ne fait pas de vous une victime de bigorexie. Cette pathologie se traduit par une planification totale de sa vie autour du sport, au détriment de sa vie familiale et professionnelle, et souvent de son intégrité physique. Le but recherché n’étant plus le plaisir ou la performance, mais l’effet euphorisant. On comprend alors que l’arrêt de toute pratique soit brutal ! »
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