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Interview : Fleury Roux, le trailer caméra-runner !

Par Simon CHRETIEN , le 8 mars 2024 , mis à jour le 8 mars 2024 - 6 minutes de lecture

Fleury Roux est un coureur difficilement classable. Expert du trail court, il affectionne également les aventures au très (très) long cours. Cet ancien coureur d’orientation de l’équipe de France s’éclate aussi en tant que camera-runner ! Rencontre !

Tout nouveau membre du Kiprun Team Trail, Fleury Roux est un coureur de trail que l’on peine à ranger dans une catégorie bien précise. Ancien coureur d’orientation, on le voit performer sur les formats de trails courts (3ème de la MCC (40km/2300mD+ en 2023) et les KV, où il excelle. S’il ne s’aligne pas sur les ultra-trails, il affectionne tout de même la pratique de la rando-course sur des défis en tout genre. Le 2 avril prochain, on le verra au départ du Great Himal Race, une course de 1800km à travers le Népal.

Jogging International : Fleury, comment te présenter ? Trailer, coureur d’orientation, aventurier, caméra-runner ? Un peu tout finalement ?

Fleury Roux : En effet, j’aime beaucoup de choses dans le sport outdoor. J’adore découvrir de nouvelles disciplines, me diversifier et j’ai du mal à choisir. J’ai débuté dans la course d’orientation que j’ai pratiqué à haut niveau. J’ai notamment été cinq fois champion de France de la discipline dans la catégorie junior et participé à plusieurs championnats du monde. J’ai mis ça de côté car ça devenait trop contraignant. Vu mes qualités de vitesse, je me suis logiquement orienté vers le trail court et le kilomètre vertical. Mais paradoxalement, je suis très attiré par les formats longs, même très longs, sans pour autant le faire sous forme de courses. En tout cas, j’aime cette polyvalence, cette idée d’avoir un bon niveau qu’importe le format et de savoir se débrouiller.

J’aime cette polyvalence, cette idée d’avoir un bon niveau qu’importe le format, de savoir se débrouiller.

D’où vient cette passion pour l’outdoor ?

Mes parents faisaient beaucoup de sport, notamment du vélo et de la course à pied ensuite. C’est eux qui nous ont donné cette envie de découvrir cette pratique. Avec mon frère, qui faisait également de la course d’orientation, dès l’âge de 8-10 ans, on les voyait sur les courses de trail, notamment la SaintéLyon qui passe à côté de chez nous. Ils nous ont transmis l’ADN du sport de compétition.

Tu performes sur le court mais on te voit également sur le très très long, à l’image de cette traversée de la Norvège réalisée en 2022 avec ton frère : 2800km en 83 jours !

Fleury Roux a traversé la Norvège en total autonomie et en orientation avec son frère.

Fleury Roux : Oui cette passion est venue très tôt. Déjà quand je faisais de la course d’orientation, j’aimais traverser des massifs avec des amis, en format aventure, rando-course. La particularité de cette traversée de la Norvège est qu’ont la faite sans GPS, en totale autonomie. On ne se guidait uniquement à l’aide de cartes et d’une boussole. La moitié du temps, nous étions donc hors sentier.

Tu t’engages sur un autre périple d’ampleur : The Great Himal Race. Qu’est ce que c’est ?

C’est une course de 1800km et 90 000 mD+ que l’on doit réaliser en 45 étapes et qui nous fait traverser tout le Népal. C’est le journaliste Bruno Poirier qui avait lancé cette course, dont la dernière édition a eu lieu en 2017. L’idée est simple : chacun des 22 concurrents, sélectionnés sur dossier, ont la journée pour rallier l’étape au rythme qu’ils souhaitent. On est totalement libre et ça se fait en mode expédition, sans balisage. Le soir, on se retrouve tous à un endroit pour passer la nuit et la journée, on repart de manière totalement libre. Nous allons passer 12 cols à plus de 5000 mètres d’altitude, avec également un passage à plus de 7000 mètres d’altitude, et traverser tous les parcs naturels du pays. On prend au total les chronos de chacune des étapes pour désigner le vainqueur. C’est une course très aléatoire qui comporte de nombreux facteurs comme l’altitude ou les conditions météo qui risquent de la rendre très dure. Par exemple, on sait qu’il y a des chemins inscrits sur les cartes qui n’existent plus à cause de l’érosion ou d’avalanches. Il faudra être très à l’écoute des locaux, qui pourront nous aider à retrouver la trace.

C’est une aventure qui te fait rêver ?

En effet, le Népal, l’Himalaya, j’ai toujours vu des images qui m’ont fait rêver. C’est la première fois que j’irais là bas. Et là, c’est une opportunité incroyable de voir tout le pays ! Quand tu vois tous les paysages, tu te dis que ça va être une sacrée aventure. Quand je regarde la trace que j’ai déjà travaillée, j’ai déjà hâte d’y être.

Pourtant, tu n’y vas pas dans les meilleures conditions, à cause d’une blessure ?

Fleury Roux : Je me suis fracturé la clavicule après une chute à ski. J’ai été opéré mi janvier et je n’ai repris la course que mi-février. C’est limite au niveau préparation car là j’ai une plaque et des vis dans la clavicule. J’ai été quatre semaines sans marcher mais le chirurgien est plutôt positif. Après c’est une aventure tellement longue que même si je n’arrive pas dès le début dans des conditions optimales, ce n’est pas très grave. Ce genre de format, c’est surtout les cinq ou dix premiers jours qui te préparent pour la suite. En Norvège, au début, on était cuit et puis ensuite le corps s’est adapté. Ce qui m’inquiète le plus, c’est le port du sac à dos, avec tout notre matériel dedans. Je ne sais pas comment va réagir ma clavicule fragilisée. En tout cas je vais me donner tous les moyens pour être au départ.

Dans le milieu on te connait aussi pour être caméra-runner ! C’est assez particulier comme pratique ?

Fleury Roux est caméra-runner. Il filme les leader de course sur les grandes épreuves de trail.

Cela fait deux, trois ans que je fais ça. Le but est de suivre les coureurs sur les grandes courses et de les filmer. Je travaille notamment sur l’UTMB, les courses du Golden Trail Series ou dernièrement les Mondiaux de trail en Autriche. J’ai découvert ça par hasard. Depuis que j’ai commencé le trail, je n’ai jamais eu la prétention de faire du haut niveau. Et là, ça me permet d’évoluer avec des coureurs que je n’aurais jamais été capable de suivre sur toute une course. Si je peux faire ça, c’est parce que j’ai le niveau pour suivre les coureurs, mais pas pour gagner les courses. En clair, je suis dans un juste milieu. Cela nécessite de faire des efforts très différents selon les courses. Par exemple sur un ultra, je vais faire plusieurs portions où je filme les premiers durant 30 bornes. Sur une Sierre-Zinal, je fais des portions de dix minutes dans les montées. Ça demande des qualités de stabilisation et c’est un boulot pas évident, mais j’adore ! Finalement, je préfère courir une MCC et suivre l’UTMB devant, avec la caméra, sans notion de résultat. Le problème, c’est que quand tu fais ça, tu es cuit après. Et c’est difficile de suivre un entraînement structuré car tu ne choisis pas le volume et l’intensité que tu veux.

je préfère courir une MCC et suivre l’UTMB devant, avec la caméra, sans notion de résultat.

Tu travailles différemment selon les courses que tu filmes ?

Fleury Roux : Cela dépend déjà avec qui je travaille. Parfois on n’a qu’un téléphone avec un stabilisateur et d’autre fois on a une GoPro et tout le dispositif de 2kg dans le dos. Après, on essaye d’être devant ou derrière le coureur que l’on filme. Quand on est devant eux, on ne voit pas forcément ce qu’on cadre. Avec l’expérience, on sait comment se positionner. La course d’orientation m’a beaucoup aidé car j’ai pris l’habitude de lire une carte en courant à 20km/h, ce qui t’oblige à stabiliser ton bras. Il y aussi l’effort qui peut être différent. C’est finalement plus simple de suivre 30 bornes sur un UTMB que dix minutes sur Sierre-Zinal ou un KV où les gars vont à 2000m/h ! Les formats 40km par exemple sont très durs car les premiers tiennent vraiment des allures impressionnantes tout du long, ce qui t’oblige à te rentrer dedans et à finir dans le dur !

Et puis il y a les descentes, ça doit être périlleux ?

La descente c’est vraiment délicat. J’ai fait des descentes où je ne regardais même pas où je mettais les pieds. Le plus dur, c’est le début. Après, tu suis la trajectoire du coureur. Mais ce qui est bien, c’est que les téléspectateurs sont toujours très bienveillants dans les commentaires. Ils ont conscience de la difficulté et sont globalement ravis des images qu’on leur offre.

Dernière question : après plusieurs années chez Salomon, tu as décidé de rejoindre Kiprun. Pourquoi ce choix ?

Je n’ai pas ressenti le soutien, notamment sur mes projets personnels chez Salomon. Ce qui n’était pas le cas de Kiprun. J’ai senti chez eux plus d’engouement. Et puis j’avais envie de tester autre chose. Il y a beaucoup de choses à faire chez Kiprun, dans le développement des produits notamment. C’est une marque qui a décidé d’investir dans le trail, et qui veut progresser. C’est un challenge qui m’intéresse beaucoup. Salomon est leader du marché, et, entre guillemet, il n’y a plus rien à faire. Enfin, ma copine, Clémentine Geoffray fait partie de leur équipe féminine, j’ai donc vu comment ça se passait au niveau des rassemblements, de l’accompagnement. Il y a beaucoup d’humain chez Kiprun.